Affaire Hariri : pas besoin d’être Leila Abdel Latif pour deviner ce qui pourrait se passer


Pas besoin d’être Leila Abdel Latif – notre pythie nationale tombée en disgrâce depuis plus d’un an – pour deviner ce qui pourrait se passer au Liban dans les jours, les semaines et les mois qui viennent.

Saad Hariri, soumis au diktat saoudien, reviendrait au Liban dans les prochains jours. Peut-être même pendant le weekend. Après les traditionnels vœux de bon retour – les fameux 7amdella 3assalémé – où plèbe et politiciens se bousculeraient au portillon de la résidence du Premier ministre prodigue pour lui serrer la paluche, Hariri se dirigerait au palais présidentiel de Baabda pour y confirmer sa démission et la remettre par écrit au président de la République.

Ce dernier se verrait obligé de l’accepter. Les consultations parlementaires qu’il organiserait, comme le veut la Constitution, n’aboutiraient à rien. Les députés, vêtus de leurs beaux costumes du dimanche, se succèderaient à Baabda, diraient tout et son contraire, tout en saluant la sagesse du président, la résilience du peuple et l’héroïsme du Premier ministre démissionnaire.

Le pays serait à nouveau divisé entre un 8 Mars inféodé à l’Iran et un 14 Mars larbin des Saoudiens. Le premier représenterait le pouvoir en place et l’autre se présenterait comme sa seule et unique opposition. Les sujets importants comme l’environnement, l’économie, le chômage, les réformes sociales, la crise des réfugiés, etc. seraient passés à trappe. Toute voix qui ne ferait pas partie de l’un des deux camps n’aurait pas droit au chapitre.

Le gouvernement démissionnaire, dit d’affaires courantes, resterait en place jusqu’au début de l’année prochaine. Puis un gouvernement dit de technocrates serait formé à la dernière minute pour organiser les élections législatives. Celles-ci auraient lieu sous le thème déjà ressassé en 2009 : pour ou contre les armes du Hezbollah. Et le changement tant espéré par les Libanais n’aurait pas lieu.

À moins qu’il y ait un sursaut citoyen, un véritable éveil, et que la société civile mette de côté l’égo des uns et des autres, et s’unisse enfin autour d’un projet politique, économique et sociétal concret et réaliste, les années à venir ressembleraient comme deux gouttes d’eau de citerne à celles qui les ont précédées.


© Claude El Khal, 2017